Points-clés
Alors même que les masses financières en jeu sont supérieures à celles du budget de l’État, le contrôle de la politique du Gouvernement en matière de sécurité sociale a longtemps échappé très largement au Parlement en raison du fonctionnement originellement paritaire de la sécurité sociale, ainsi que de son financement partagé entre salariés et employeurs. L’impôt, et non plus seulement les cotisations sociales, étant devenu une source majeure de financement des dépenses de sécurité sociale, le Parlement, depuis 1996, se prononce désormais sur les conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale.

La révision constitutionnelle du 22 février 1996 (1) a donc créé une catégorie particulière de loi, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS). Encadrées par des dispositions constitutionnelles complétées par une loi organique de 1996 remaniée en 2005 et en 2022, les conditions d’examen annuel des projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) par l’Assemblée nationale se distinguent de celles des projets de loi ordinaires.

 

I. –    LES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE : SPÉCIFICITÉ, CONTENU, PRÉSENTATION, ANNEXES

1. –     UNE CATÉGORIE  PARTICULIÈRE DE LOI ORDINAIRE, AU PÉRIMÈTRE BIEN DÉFINI

Comme la loi de finances, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) est une catégorie particulière de loi dont les conditions d’examen sont encadrées par des règles propres (voir infra) et dont le périmètre est défini par la Constitution et la loi organique.

L’article 34 de la Constitution dispose que les lois de financement de la sécurité sociale « déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ».
Les règles spécifiques qui leur sont applicables résultent de la loi organique n° 96 646 du 22 juillet 1996, modifiée par les lois organiques n° 2005 881 du 2 août 2005, n° 2010-1380 du 13 novembre 2010, n° 2020 991 du 7 août 2020 et n° 2022 354 du 14 mars 2022. Ces dispositions sont codifiées principalement sous les articles L.O. 111-3 à L.O. 111-10-2 du code de la sécurité sociale.

La définition de la « sécurité sociale », au sens des LFSS, est plus étroite que celle qui est retenue en comptabilité publique pour les administrations de sécurité sociale, car elle s’entend des régimes obligatoires de base et des fonds concourant à leur financement :

–    les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale (ROBSS) incluent pour l’essentiel le régime général et la Mutualité sociale agricole (MSA) ;

–    le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est désormais le seul fonds à concourir au financement des régimes obligatoires ;

–    sont en revanche exclus du champ des LFSS tant les régimes complémentaires que l’assurance chômage, choix que le législateur organique a encore confirmé à l’occasion des débats ayant conduit à l’adoption de la loi organique du 14 mars 2022. Seul l’article liminaire rendra compte de l’évolution budgétaire de ces régimes.

Entrent également dans le champ des LFSS, la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) ainsi que le Fonds de réserve pour les retraites (FRR), en vertu des liens directs qu’ils entretiennent avec les conditions de l’équilibre financier des ROBSS.

Comme pour les lois de finances, on peut distinguer quatre domaines des LFSS :

–    le domaine obligatoire inclut les mesures devant obligatoirement figurer en loi de financement. Il est défini aux articles L.O. 111-3-2 à L.O. 111-3-5 du code de la sécurité sociale pour les lois de financement de l’année. Aux termes mêmes de l’article 34 de la Constitution, la LFSS doit déterminer les conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale, prévoir ses recettes et fixer ses objectifs de dépenses. La LFSS comporte des tableaux d’équilibre qui présentent pour chaque exercice considéré la situation financière par branche des régimes obligatoires de base ainsi que des organismes concourant à leur financement. Elle fixe également l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM). Il est scindé en six sous objectifs dans la LFSS 2022 (2). L’article L.O. 111 3 17 du code de la sécurité sociale dispose que les comptes des régimes et organismes de sécurité sociale doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle de leur patrimoine et de leur situation financière (3) ;

–    le domaine exclusif contient les mesures qui, si elles ne doivent pas obligatoirement figurer en loi de financement, ne peuvent figurer dans une autre loi, comme l’affectation – totale ou partielle – à toute autre personne morale d’une recette exclusive des régimes de base et des organismes concourant à leur financement ; la répartition entre ces mêmes régimes (le cas échéant, entre leurs branches) et organismes concourant à leur financement des ressources établies au profit de l’État qui leur ont été affectées ; la création ou la modification de mesures de réduction, d’exonération ou d’abattement d’assiette de cotisations ou de contributions sociales dès lors que ces mesures sont soit non compensées, soit sont établies pour une durée égale ou supérieure à trois ans et qu’elles ont un effet sur les recettes des régimes et organismes sociaux ou sur l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des cotisations et contributions en question ;

–    le domaine partagé est celui des mesures qui peuvent figurer en loi de financement, mais qui pourraient figurer dans une autre loi, telles que les dispositions modifiant l’assiette ou le taux d’un impôt dont le produit est affecté aux organismes de sécurité sociale, ou bien encore les mesures permettant d’améliorer l’information du Parlement sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale ;

–    le domaine interdit renvoie aux « cavaliers sociaux », c’est-à-dire aux mesures étrangères au champ des LFSS (voir infra).

2. –    LA STRUCTURE DES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Jusqu’à l’exercice 2023, la loi de financement de la sécurité sociale pour l’année n+1 comprenait quatre parties. Elle n’en comporte plus que trois, désormais précédées, à l’image des lois de finances, par un article liminaire présentant, pour l’exercice en cours et pour l’année à venir, l’état des prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale. En effet, la première partie, relative au dernier exercice clos, constituait l’équivalent d’une loi de règlement, mais en matière de finances de la sécurité sociale, c’est à dire d’une forme d’arrêté des comptes de l’année n-1 : elle n’a plus lieu d’être depuis que la loi organique du 14 mars 2022 a créé une nouvelle catégorie de loi de financement (article L.O. 111 3 13), la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (LACSS), qui se substitue donc à cette ancienne première partie. Ainsi, la LACSS examinée en 2023 aura vocation de clore les comptes des administrations de sécurité sociale de l’année 2022.

Désormais, la première partie correspond donc à l’ancienne deuxième partie. Elle est consacrée aux dispositions relatives à l’année en cours (année n), ce qui permet au Gouvernement de proposer au Parlement d’adopter des rectifications des données arrêtées en loi de financement pour l’année n. Cette partie correspond en quelque sorte à ce qu’est une loi de finances rectificative pour le budget de l’État ; pour autant, les dispositions organiques continuent de prévoir de véritables lois de financement rectificatives (articles L.O. 111 3 9 à L.O. 111 3 12), sachant toutefois qu’à ce jour, seulement deux ont été promulguées, en 2011 et en 2014.

La deuxième partie (anciennement troisième partie) comprend, pour l’année n+1, les dispositions relatives aux recettes des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement et établit leurs prévisions de recettes et leur équilibre général ; outre les tableaux d’équilibre relatifs à l’année n+1 (recettes, dépenses et soldes), elle fixe ainsi les plafonds d’avances de trésorerie auxquelles peuvent recourir les régimes (4).

La troisième partie (anciennement quatrième partie) comprend, pour l’année n+1, les dispositions relatives aux dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement et fixe les objectifs de dépenses des différentes branches de la sécurité sociale (maladie ; accidents du travail et maladies professionnelles ; vieillesse ; famille ; autonomie). L’objectif le plus important – et le plus commenté – est sans nul doute l’ONDAM (objectif national des dépenses d’assurance maladie), qui donne la tendance d’évolution des masses financières les plus importantes, et affiche les priorités retenues par le Gouvernement dans la politique de soins. 

3. –    LES DOCUMENTS ANNEXÉS AUX PROJETS DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Les PLFSS de l’année sont accompagnés d’une annexe votée, et donc susceptible d’être modifiée par la voie d’amendements parlementaires, et d’une dizaine d’annexes informatives.

La première est un rapport (« annexe B ») décrivant, pour les quatre années à venir, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base, par branche, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’ONDAM (article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale). Ce rapport comprend désormais, en application de la loi organique du 14 mars 2022, une présentation des écarts cumulés entre, d’une part, les prévisions de dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement, présentés dans la loi de programmation des finances publiques en vigueur et, d’autre part, ceux qui sont présentés dans le rapport annexé au PLFSS de l’année.

S’agissant des annexes informatives, celles-ci visent à renseigner les parlementaires ainsi que l’ensemble des citoyens sur :

•    le nombre de cotisants et de retraités au sein des régimes obligatoires de base ;
•    les comptes prévisionnels des organismes concourant au financement ou financés par ces mêmes régimes ;
•    l’évolution des recettes, des dépenses et du solde des régimes, ainsi que l’impact attendu des mesures contenues dans le PLFSS de l’année ;
•    le montant, la liste et les effets de l’ensemble des mesures de réduction ou d’exonération de cotisations ou de contributions sociales ;
•    la situation financière du système de santé, notamment par le biais de précisions sur la construction de l’ONDAM ou sur la situation financière des établissements de santé ou des établissements médico-sociaux ;
•    l’effort financier national en faveur du soutien à l’autonomie ;
•    la situation financière des régimes d’assurance chômage et des retraites complémentaires pour l’année en cours et l’année à venir.

La loi d’approbation des comptes (LACSS), créée par la loi organique du 14 mars 2022, doit également être accompagnée d’annexes visant à :

•    présenter, par branche, des rapports d’évaluation des politiques de sécurité sociale (REPSS) ;
•    énumérer le montant, la liste et les effets de l’ensemble des mesures de réduction ou d’exonération de cotisations ou de contributions sociales, en les évaluant par tiers chaque année, afin de vérifier leur adéquation à l’objectif qu’elles poursuivent ;
•    informer sur l’exécution des comptes clos, y compris pour les régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires ou d’assurance chômage, ou la mise en œuvre des dispositions contenues dans la LFSS de l’année n -2.

En outre, la LACSS approuve un rapport portant sur la situation patrimoniale de la sécurité sociale et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits constatés pour le dernier exercice clos (4° de l’article L.O. 111 3 13).

II. –    UNE PROCÉDURE PARLEMENTAIRE PARTICULIÈRE

Depuis la loi organique du 2 août 2005, le Parlement est associé à la préparation du projet de loi de financement grâce à la tenue, au printemps, d’un débat d’orientation des finances publiques, qui concerne le budget de l’État, mais aussi les finances sociales et locales. Le Gouvernement présente un rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, comprenant notamment une évaluation pluriannuelle de l’évolution des recettes et des dépenses des administrations de sécurité sociale ainsi que de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, qui peut donner lieu à un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat (article 1er K de la loi organique relative aux lois de finances).

Comme en matière de lois de finances, le Gouvernement dispose du monopole de la présentation des lois de financement, qui ne peuvent donc résulter que de l’adoption d’un projet de loi. L’article 47-1 de la Constitution fixe les grands traits de la procédure applicable à l’examen par le Parlement des PLFSS.

1. –    UNE DISCUSSION ENCADRÉE PAR DES DÉLAIS CONSTITUTIONNELS

L’article 39 de la Constitution dispose que les PLFSS, comme les projets de loi de finances (PLF), sont soumis en premier lieu à l’Assemblée nationale. Le projet de loi de financement de l’année n+1 doit être déposé sur son bureau au plus tard le premier mardi d’octobre de l’année n (article L.O. 111 6) (5). – cette date ayant été avancée par la loi organique du 14 mars 2022, puisqu’elle était fixée auparavant au 15 octobre. 

De même que l’article 47 pour les projets de loi de finances, l’article 47 1 de la Constitution fixe de manière stricte les délais d’examen des projets de loi de financement : si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans un délai de vingt jours après le dépôt du projet, le Gouvernement saisit le Sénat. Ce dernier doit statuer dans un délai de quinze jours. Si le Parlement ne s’est pas prononcé dans un délai global de cinquante jours, les dispositions du projet peuvent être mises en œuvre par ordonnance, ce qui ne s’est jamais produit jusqu’ici. 

La loi organique du 2 août 2005 rend la procédure accélérée applicable de droit à l’examen des PLFSS (article L.O. 111 7). Le dernier alinéa de l’article 42 de la Constitution dispose par ailleurs que le délai de six semaines devant en principe s’écouler entre le dépôt d’un texte et sa discussion en séance publique n’est pas applicable aux PLFSS.

Comme pour les lois de finances, la contrepartie de ces délais contraignants est une protection particulière du domaine des lois de financement de la sécurité sociale. Ainsi, les dispositions dépourvues de lien avec le financement de la sécurité sociale sont elles considérées comme des « cavaliers sociaux » et censurées à ce titre :

–    soit par le président de la commission des finances, s’agissant des amendements, au stade de leur dépôt ;

–    soit par le Conseil constitutionnel, dont la compétence en la matière s’étend aux articles du projet de loi initial.

2. –    L’EXAMEN EN COMMISSION

Contrairement aux PLF qui, en application de l’article 39 de la loi organique relative aux lois de finances, sont renvoyés aux commissions chargées des finances, il n’existe pas de renvoi automatique du projet de loi de financement aux commissions parlementaires chargées des affaires sociales. Cependant, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, la commission des affaires sociales a toujours été chargée de l’examen au fond des PLFSS ; la commission des finances s’en saisit pour avis.

Depuis la XVe législature, en application des articles 39 et 47 du Règlement de l’Assemblée nationale dans leur rédaction résultant de la résolution du 28 novembre 2014, la commission des affaires sociales, comme la commission des finances, désigne un rapporteur général.

Celui ci a rapporté seul les trois premiers PLFSS de la XVe législature. À compter du PLFSS 2021, la commission a désigné cinq rapporteurs, chargés respectivement : des recettes, de l’équilibre général et de la santé (6) ; de l’autonomie et du secteur médico social ; de la famille ; de l’assurance vieillesse ; des accidents du travail et maladies professionnelles. Ces rapporteurs rédigent chacun une partie du rapport consacré au projet de loi. Ils suivent et contrôlent l’application des lois de financement et procèdent à l’évaluation de toute question relative aux finances de la sécurité sociale ; à cette fin, ils peuvent effectuer des contrôles sur pièces et sur place (article L.O. 111 9) (7). Avant le 10 juillet de chaque année, ils peuvent adresser des questionnaires au Gouvernement afin de préparer l’examen du projet de loi de financement à venir (article L.O. 111 8). La commission des affaires sociales peut également suivre toute l’année l’application des LFSS grâce aux travaux de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) constituée en son sein (article L.O. 111 10).

Les travaux relatifs au PLFSS débutent traditionnellement à la mi septembre avec l’audition par la commission des affaires sociales du premier président de la Cour des comptes. Celui-ci pourra également être auditionné dans le cadre de la préparation du projet de LACSS, à l’occasion duquel il pourra présenter le rapport annuel de la Cour sur l’application des LFSS prévu à l’article L.O.132 3 du code des juridictions financières.

Après l’audition des ministres qui suit l’adoption du projet de loi par le Conseil des ministres, la commission des affaires sociales examine le texte. Généralement, trois à cinq réunions sont nécessaires compte tenu du nombre d’articles et d’amendements à examiner.

3. –    LA DISCUSSION EN SÉANCE PUBLIQUE

Nombre des dispositions spécifiques applicables à la discussion des PLFSS en séance publique sont identiques à celles prévues pour la discussion des PLF.

Ainsi, en application de l’article 42, alinéa 2, de la Constitution, l’examen en séance publique du PLFSS s’engage sur la base du texte présenté par le Gouvernement.

De même, les modalités de discussion du PLFSS sont décidées par la Conférence des présidents. Dans l’ordre du jour de l’Assemblée nationale et compte tenu des délais très courts imposés par la Constitution, la discussion du PLFSS se déroule immédiatement après l’adoption de la première partie du PLF. La procédure dite du « temps législatif programmé » (fixation de la durée maximale de l’examen d’un texte) n’est pas applicable à l’examen du PLFSS.

La discussion en séance publique occupe quatre à cinq jours. Si elle suit les règles habituelles en matière de discussion de projets de loi, elle présente des particularités en matière d’ordre de vote des différentes parties du projet de loi. En effet, le I de l’article L.O. 111 7 1 du code de la sécurité sociale prévoit notamment que la partie du PLFSS comprenant les dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre général de l’année à venir ne peut être mise en discussion avant l’adoption de la partie comprenant les dispositions rectificatives pour l’année en cours. De même, la partie comprenant les dispositions relatives aux dépenses pour l’année à venir ne peut être mise en discussion avant l’adoption de la partie comprenant les dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre général pour la même année.

Enfin, la possibilité pour le Gouvernement de recourir à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (engagement de responsabilité sur le vote d’un texte) a été maintenue sans limitation pour le vote des PLFSS comme pour celui des PLF.

4. –    LA NAVETTE PARLEMENTAIRE ET LA PROMULGATION DE LA LOI

La procédure accélérée s’appliquant de droit, le projet de loi de financement fait donc l’objet, après sa lecture au Sénat, de la réunion d’une commission mixte paritaire (CMP) chargée d’examiner les dispositions du texte restant en discussion. La procédure suivie en cas de succès de la CMP (élaboration d’un texte) ou d’échec de cette commission est la procédure normale applicable à tous les projets de loi, par conséquent soit une lecture successive des conclusions de la CMP dans chacune des deux assemblées, soit une nouvelle lecture dans chaque assemblée puis, le cas échéant, une lecture définitive donnant le dernier mot à l’Assemblée nationale.

Avant sa promulgation, la loi de financement est soumise à l’appréciation du Conseil constitutionnel, s’il en est saisi, ce qui a presque toujours été le cas jusqu’à présent. Le juge constitutionnel a développé une abondante jurisprudence, en particulier sur le champ des lois de financement. Il a ainsi censuré à de multiples reprises certaines dispositions considérées comme des cavaliers sociaux, soit parce qu’elles ne relevaient à l’évidence pas du domaine de la sécurité sociale (8), soit parce qu’elles n’avaient pas d’incidence directe et suffisante sur les conditions générales de son équilibre financier (9).

 

(1) Loi constitutionnelle n° 96-138 du 22 février 1996 instituant les lois de financement de la sécurité sociale.

(2) Sachant que le nombre de sous-objectifs ne saurait être inférieur à trois (3° de l’article L.O. 111-3-5 du code de la sécurité sociale). Les sous-objectifs 2022 sont les suivants : dépenses de soins de ville ; dépenses relatives aux établissements de santé ; dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées ; dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées ; dépenses relatives au Fonds d’intervention régional (FIR) ; autres prises en charge.

(3) Le 4° de l’article L.O. 111-4-6 prévoit d’ailleurs la certification de la régularité et de la fidélité des comptes sociaux par la Cour des comptes.

(4) Il faut en effet préciser que contrairement à l’État, les organismes de sécurité sociale ne sont en principe pas autorisés à s’endetter de manière pérenne ; le recours à l’emprunt a simplement vocation à couvrir des besoins de trésorerie infra-annuels.

(5) En vertu de ce même article L.O. 111-6, le projet de LACSS, pour sa part, doit être déposé avant le 1er juin de l’année suivant celle de l’exercice auquel il se rapporte, sachant en outre que l’article L.O. 111-7-1 dispose que « le projet de loi de financement de l’année ne peut être mis en discussion devant une assemblée avant l’adoption de la loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale afférente à l’année qui précède celle de la discussion dudit projet de loi de financement ». Le premier projet de LACSS (pour les comptes de 2022) a été déposé le 24 mai 2023 à l’Assemblée nationale (n° 1268).

(6) Cette fonction a été exercée par le rapporteur général.

(7) Ces pouvoirs sont également accordés au président de la commission ainsi qu’aux coprésidents de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (cf. infra).

(8) Ainsi de l’obligation faite à l’employeur de proposer un plan de mobilité à ses employés.

(9) Ainsi de l’autorisation de la vaccination par les centres d’examen de santé ou de l’aménagement du partage du congé d’adoption entre les parents.

Septembre 2023